Adjugé 22 millions €
Peinture impériale : représentation de la première grande revue du règne de Qianlong en 1739, d’une série de 4 décrivant les manœuvres des troupes de l’Empire. Rouleau horizontal en encre et couleurs sur soie, dû à plusieurs peintres de la Cour, date de 1747 ou 1748.
Ce rouleau horizontal en encre et couleurs sur soie, dû à plusieurs peintres de la Cour, date de 1747 ou 1748. Il conclut une série de quatre, immortalisant une revue militaire ayant mobilisé quelque 20 000 hommes.
La localisation actuelle de la première de ces peintures : Xingying (L’empereur se rend au camp) reste inconnue. Elle représenterait la suite impériale se rendant au lieu de la Revue, le parc du Sud Nanyuan, où les empereurs mandchous tenaient des manœuvres militaires.
La seconde, Liezhen (Les troupes se rangent en bataille) toujours conservée au Palais de Pékin, sert de modèle aux trois dernières de la série. Elle offre le coup d’œil de Sa Majesté depuis le bastion où a été dressée sa tente de commandement. Toutes les unités sont soigneusement représentées en formation : deux ailes de cavalerie flanquent le corps de bataille des Huit bannières.
Sur le troisième rouleau, Yuezhen (Passer les troupes en revue) Sa Majesté, inspecte les troupes, chevauchant derrière les mousquetaires et les artilleurs, devant la cavalerie, dont les rangs se sont écartés sur le passage du souverain.
Enfin, le quatrième, Xingzhen (Manœuvres) objet de cette vente, saisit l’instant où une salve de toutes les bouches à feu noie les premiers rangs d’une épaisse fumée.
Les Grandes revues dayue remontent à 1633. Démonstrations de force pour impressionner la noblesse mandchoue et les princes tributaires, elles combinent manœuvres militaires et mise en scène de la majesté impériale. L’empereur Shunzhi (r. 1644-1661) décrète en 1656 qu’elles auraient lieu tous les trois ans au parc du Sud. Les annales de Qianlong mentionnent celle de 1739 comme première grande revue de son règne.
La peinture se termine sur une longue inscription portant son titre en grands caractères dans le style des scribes : Dayue disi tu, xingzhen « La Grande revue, IV : Manœuvres. » Elle décrit les mouvements des troupes sous les yeux de Sa Majesté, qui a rejoint son poste de commandement. Des sonneries de conques, tambours et gongs règlent les manœuvres. Des bannières rouges commandent des salves de l’artillerie et des mousquetaires. Après neuf marches et contre marches, ponctuées de décharges des bouches à feu, la revue prend fin.
L’empereur et sa suite se retirent, ôtent leurs armures, avant qu’un banquet ne récompense les troupes. Le texte énumère enfin les peintres et les chroniqueurs ayant conservé la mémoire de l’événement ; aucun de leurs sceaux n’est apposé. Académiciens et hauts fonctionnaires, ministres, les rédacteurs du colophon sont connus pour leurs talents de calligraphes en régulière, se référant souvent aux grands maîtres des Tang. Il s’agit de Wang Youdun (1692-1758), Liang Shizheng (1697-1763), Ji Huang (1711-1794), Zhang Ruo’ai (1711 ou 2 1713-1746) et Zhuang Yougong (1713-1767).
Dix peintres de l’académie Impériale de peinture huayuan ont travaillé sur les rouleaux de La Grande revue, mais Jin Kun, actif dans la première moitié du XVIIIe siècle, reste responsable de la bonne exécution de l’oeuvre. Ding Guanpeng, actif entre 1726 et 1771, fut l’un des peintres favoris de Qianlong. Les autres sont Wu Gui, Jin Sheng, Yao Wenhan, Zhang Tingyan (?-1794) Chen Yongjie, Cheng Zhidao (actif entre 1740 et 1796) Cheng Liang et Lu Zhan. Les archives des Ateliers de la Maison impériale Neiwufu zaobanchu content l’histoire de la peinture des quatre rouleaux de La Grande revue. Après une erreur dans la position des troupes des différentes bannières, la peinture doit être reprise à partir d’avril 1746. Le 7 janvier 1748, Qianlong ordonne : « La Grande revue va bientôt être terminée. Faites faire un modèle de boîte pour chaque rouleau, et présentez les Nous pour examen. » La maquette des écrins de laque gravée rouge ayant reçu l’assentiment de l’empereur, il décide qu’y soit encore inscrite la date Qianlong dingmao nianzhi « Fait en l’an dingmao de l’ère Qianlong (1747) ». Cependant, une dernière pièce nous apprend que la livraison de l’ensemble dans ses écrins ne fut effectuée que le 20 juin 1749. La commande a pu intervenir dès 1740. Même une dizaine d’artistes peuvent avoir pris 7 ans pour réaliser une telle série de rouleaux en style miniaturiste. Il faut encore compter le temps de la monture – un an – et de la fabrication des écrins.
Publication : Le Shiqu baoji xubian (Suite aux Œuvres précieuses conservées à la pinacothèque Impériale) connue sous le nom de “Catalogue impérial”, contient une notice (pp. 1871-1875) sur les quatre rouleaux de La Grande revue. Citant les colophons in extenso, elle précise les circonstances et la date de l’événement représenté. D’abord déposée au palais de l’Estime de l’éclat des vertus civiles Zhonghuagong, La Grande revue a certainement rejoint les portraits des empereurs défunts au Shouhuangdian (palais de la Continuation de l’empire), à la mort de Qianlong (1799). Provenance : Ce rouleau fait partie d’une collection privée française depuis le début du XXe siècle. Experts : Cabinet Pierre Ansas & Anne Papillon d’Alton, 3 rue Geoffroy-Marie, 75009 Paris ansaspapillon.com